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Si j’écoutais mes hormones

C’est amusant d’être une femme.

C’est amusant ce besoin qu’a l’être humain de se reproduire.

Non, il ne s’agit pas seulement d’une envie que l’on a d’avoir un enfant, au début cela commence plus comme quelque chose d’incontrôlable. Bien sûr, c’est notre raison qui dicte si oui ou non nous céderons à cet appel, si nous en avons réellement envie, si nous en sommes capables, mais en vrai les choses sont bien plus compliquées que cela, il nous faut aussi gérer nos impulsions, ces élans qui viennent du fond de nous-même.

Mais si l’on n’écoutait que cette voix qui monte de nos tripes, ce besoin viscéral, bestial au fond de nous-même qui dit « vite, engendre, reproduis-toi ! », la population ne serait pas vieillissante qu’on se le dise. [Je ne vais parler que de l’aspect féminin de ce besoin, car je ne suis pas bien placée pour savoir ce qui se joue dans la tête et les tripes des hommes. Sommes-nous identiques sur ce point-là ? Est-ce aussi continu que chez la femme ? Aussi puissant ? Ce besoin arrive-t-il aussi tôt ?]

Sommes-nous faites uniquement pour enfanter, pour subir ces messages que notre corps nous envoie ?

Mon horloge biologique s’étant mise en route très jeune, je n’envisage plus vraiment ma vie sans elle en toile de fond. Pourtant, je sais que chaque femme est différente, le besoin et l’envie d’enfants n’arrivent pas pour tout le monde au même moment, et parfois l’horloge ne se met tout simplement jamais en route puisque certaines personnes ne veulent pas avoir d’enfants.

Souvent je regarde cela avec amusement, je me dis que la nature est bien faite, tout ça, tout ça…

Mais d’autres fois comme actuellement, j’aimerai juste faire taire mes hormones, les mettre en sommeil, en sourdine. Comme si l’amusement de départ concernant nos faiblesses d’humains se transformait peu à peu en agacement.

C’est comme si, après avoir accouché dans la douleur, on oubliait quand même les difficultés de la grossesse, ces neuf longs mois. Puis, comme si cela ne suffisait pas, on oublie aussi la partie accouchement, les suites de couches, le manque de sommeil, les nuits coupées…

Et puis on oublie toute la partie « raisonnable », celle qui prend en compte notre état de fatigue actuel, les recommandations des médecins qui disent : « 9 mois pour faire un bébé, 9 mois pour le « défaire » « (ce qui est même le plus souvent arrondi à une pause de 1 an avant d’envisager d’essayer d’avoir un autre bébé), les finances, l’espace dans la maison, l’aspect organisation au sens vaste, la situation professionnelle… et j’en passe.

Et en dehors, c’est comme si la nature nous envoyait des signaux disant « vas-y », comme si elle essayait de nous tenter. En vrai, je sais que c’est seulement un état dans lequel nous sommes plus réceptives. Mais qu’est-ce que cela peut être difficile !

C’est comme si tu te retrouvais continuellement à une réunion de femmes enceintes ou de jeunes mamans, surtout quand on est dans la tranche d’âge « procréation » (les 20-40ans environ), tu ne peux pas faire deux mètres dans la rue sans voir une dizaine de ventres bien ronds, des poussettes avec de merveilleux bébés dedans (Eh oui, c’est la dure réalité, les enfants que tu croises pendant ces moments-là sont forcément beaux, sages et te donnent forcément envie de cesser tout moyen de contraception le jour même !).

Et ça, c’est sans parler des réseaux sociaux, car là c’est juste le dernier endroit où se rendre en cas de pic d’hormones : annonces de grossesses y côtoient les annonces de naissances, les merveilleuses photos de ventres arrondis, les bouilles de jolis nouveaux nés, les mines fatiguées mais heureuses des jeunes parents, des photos de familles nombreuses…

Bref, en ce moment, l’univers tente de me mettre à l’épreuve en m’envoyant toute sorte de signaux (moi, paranoïaque ? si peu !!!).

Parfois, j’ai le sentiment de n’être qu’un utérus sur jambes, incapable de voir la réalité autrement qu’avec le filtre « maman », comme si j’étais dépendante de ma condition de femme. Heureusement, ce ne sont que de brefs passages dans la vie, des moments où nous sommes plus perméables à ce genre d’émotions et de messages envoyés par notre corps.

Et je me demande souvent si j’arriverai à mettre un point final à ce besoin, comment cela se termine, est-ce juste notre raison qui jugule ce besoin à force ou cela finit-il par s’estomper ? Et par là j’entends, est-ce qu’on arrête de vouloir un jour d’autres enfants, est-ce qu’on arrive à être satisfaite et se dire que ça y est nous sommes au complet ? Arriverai-je en tenant ou allaitant un de mes enfants à me dire, c’est le dernier, c’est la dernière fois… J’espère que oui et sans pincement au cœur si possible !

Ce qui est sûr, c’est qu’au fond de moi je n’ai pas atteint ce point-là. Je sais que nous ne sommes pas encore au complet.

Et encore, je me plains de ressentir encore cela alors que j’ai déjà l’immense chance d’avoir deux louveteaux. Je n’ose même pas imaginer la souffrance que doivent ressentir ces parents qui n’arrivent pas à avoir d’enfants alors qu’ils en veulent de tout leur cœur.

Si je n’écoutais que le nœud au fond de mon ventre, si j’écoutais mes hormones plutôt que ma raison, je supplierais grand loup de faire un autre enfant.

Oui mais voilà, je suis humaine, je suis un être doué de raison (enfin j’essaye…La plupart du temps…), alors j’encaisse juste mes envies, je prends sur moi, je serre les dents, et j’attends que cela passe ou que cela soit le bon moment.

En attendant, je me torture, je bave devant la layette, je peaufine notre liste à rallonge de prénoms, je réfléchis à comment j’annoncerai ma grossesse si c’était le cas (avec tous les cas de figure envisagés : un seul ou des jumeaux, annonce à Grand Loup, aux enfants, à nos familles, aux parrains et marraines…), je pense décoration de chambre, je suis nostalgique de mes grossesses, je regarde les photos de mon ventre quand j’attendais mes louveteaux, je regarde et palpe mon ventre actuellement si vide mais encore si gras et flasque (souvenirs de ma dernière grossesse… J’ai encore du chemin à faire !)…

J’ai trouvé qu’être enceinte était épuisant, difficile, mais pourtant j’ai adoré cela, j’ai beaucoup dû me plaindre, j’en suis persuadée, mais qu’est-ce que cela me manque, qu’est-ce que c’est un état de j’apprécie !

Mais zut, si je vois passer encore une seule annonce de grossesse avant la fin de la journée, je vais finir de m’enfiler le pot de nutella qui m’attend sagement sur l’étagère de la cuisine !

Blague à part, les annonces sont toujours une belle nouvelle pour moi, même si je sens mon être se partager en deux. Une partie sincèrement heureuse pour les futurs parents, déjà prête à conseiller, discuter, réfléchir au cadeau de naissance, et une partie un peu envieuse. Et c’est cette dernière partie qui s’arrange pour me faire sentir comme un coup de poing dans le ventre au moment de la découverte, et l’estomac noué jusqu’à la fin de ma journée.

Si je m’écoutais, nous serions 5 et non pas 4… Et après cela, tout recommencerait, encore.

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